Sous-Secrétaire Générale des Nations-Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires et Coordinatrice Adjointe des Secours d’Urgence, Mme Ursula Mueller – Remarques lors de la table ronde sur la situation humanitaire au Burkina Faso et dans le Sahel

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Chers Partenaires, Chers Collègues,

Permettez-moi, tout d’abord, de vous remercier pour l’opportunité qui m’est offerte aujourd’hui, à Dakar, de présenter la situation humanitaire extrêmement préoccupante au Burkina Faso et au Sahel de manière générale.

Suite à l’invitation de la Coordonnatrice Résidente du Burkina Faso, Mme Metsi Makhetha, je viens de passer trois jours à Ouagadougou et dans la région du Centre-Nord où nous avons vu l’urgence de la situation humanitaire et évalué les capacités disponibles pour la réponse.

Durant cette visite, j’ai eu la chance de rencontrer le Président, Son Excellence Mr. Kabore, les membres du gouvernement, les représentants des agences onusiennes et les ONGs à Ouagadougou et sur le terrain.

J’ai pu constater que l’insécurité grandissante dans le nord et l’est du pays, et la présence de groupes armés ainsi que les conflits intercommunautaires, ont provoqué des déplacements massifs et causé des besoins humanitaires sans précédents pour le Burkina Faso. En effet, en 2018, plus de 200 incidents sécuritaires ont été relevés dans les régions affectées par ces conflits, faisant plus de 200 morts. Depuis le début de l’année, 56 incidents sécuritaires ont déjà été enregistrés ce qui confirme une tendance inquiétante.

L’escalade de la violence a contraint plus de 100 000 personnes à quitter leur domicile. Plus de la moitié d’entre elles ont fui il y a quelques semaines à peine. L’insécurité persistante, particulièrement ces derniers mois, a également provoqué la fermeture de plus de 1100 écoles, privant plus de 150,000 enfants de scolarité.

Dans les camps de Bersalogho et Foubé que j’ai visité, j’ai vu les besoins criants de ces personnes qui ont perdu tout ce qu’elles avaient construit au cours de leur vie. Mais j’ai également vu leur incroyable résilience et volonté de recommencer à vivre, malgré les conditions difficiles dans lesquelles elles se trouvent. J’ai vu la détresse de Djeneba qui a perdu son mari et cinq de ses enfants dans les violences récentes a Yirgou en janvier 2019. J’ai également été impressionnée par la force et le sourire de Fatoumatta, 13 ans, écolière dans une classe de plus de 120 élèves pour un seul professeur.

Durant mes entretiens avec les hauts-représentants burkinabè, y compris le Président du Burkina Faso et la ministre en charge de l’Action Humanitaire, il a été souligné l’importance du soutien de la communauté internationale, en coopération avec le gouvernement et les autorités locales, pour faire face aux besoins humanitaires croissants. En tant qu’acteurs humanitaires, avec l’appui de la communauté internationale, nous devons faire tout ce qui est possible pour augmenter nos capacités de réponse dans les régions du pays affectées par les attaques et l’insécurité.

Le plan humanitaire 2019, lancé conjointement par la communauté internationale et le gouvernement le 14 février dernier, visera à appuyer directement ces personnes impactées.

Ce plan de plus de 100 millions de dollars cible 900 000 personnes pour un appui direct en sécurité alimentaire et nutrition, eau et assainissement, protection, éducation et santé. Au regard de l’urgence de la crise au Burkina Faso, les Nations – unies, via le fond d’urgence (CERF) coordonné par OCHA, viennent d’allouer 4 millions de dollars pour la réponse immédiate aux déplacés en apportant un appui en abris, soins de santé, sécurité alimentaire et protection. J’invite donc les bailleurs à accentuer leur support et contribuer à ce plan afin d’assurer une réponse immédiate et adéquate aux nombreux besoins identifiés.

Chers Partenaires et Collègues,

La crise humanitaire au Burkina Faso ne peut être détachée du contexte régional au Sahel. En effet, l’insécurité grandissante a des conséquences humanitaires considérables. Au Mali, le nombre de personnes déplacées internes par les violences continues et l’insécurité a triplé en 2018 pour atteindre plus de 120,000 personnes. La zone transfrontalière du Niger, Burkina Faso et Mali, regroupe, désormais, de nombreux groupes armés et est devenue le lieu de conflits intercommunautaires et agro-pastoraux d’une violence inédite.

Dans la région du lac Tchad, la recrudescence des attaques par les groupes armés préoccupe grandement la communauté humanitaire. Le nombre de déplacés n’a jamais été aussi élevé. Aujourd’hui, au Tchad, Cameroun, Niger et Nigeria, plus de 2,7 millions de personnes ont fui les attaques de groupes armés, tel que Boko Haram.

Du Mali au Cameroun, ces crises transfrontalières ont créé des besoins humanitaires aigus et restreint l’accès aux services de base dans des régions ou la présence de l’Etat et de la communauté internationale est limitée.

Chers Partenaires et chers Collègues,

Cette instabilité grandissante touche une région déjà vulnérable. Le Sahel étant l’une des régions du monde la plus touchée par l’insécurité alimentaire. En effet, la sécheresse de 2017, qui avait forcé la transhumance la plus précoce depuis 30 ans, avait touché plus de 12 millions de personnes et malgré une saison des pluies positive en 2018, il est estimé que 9.5 millions de personnes pourraient encore souffrir d’insécurité alimentaire en 2019.

S’il est primordial de renforcer et augmenter notre assistance humanitaire immédiate aux populations du Sahel, il est également urgent de s’attaquer aux sources de vulnérabilités en priorisant la réduction de risque de catastrophes et la prévention. Nous devons trouver conjointement les solutions pour bâtir la résilience des populations contre les chocs futurs, et ce, incluant les effets du changement climatique.

Le Sahel est vulnérable, certes, mais il est important de reconnaitre son grand potentiel. Malgré ces nombreux défis, il est désormais à nous, partenaires humanitaires et de développement, de définir une approche commune pour le Sahel. La Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel est un premier pas mais nous devons et pouvons faire plus !

Le savoir-faire est présent ! Il nous reste maintenant à renforcer nos partenariats soutenus par des fonds flexibles et adaptés qui nous permettrons, sans nul doute, de faire la différence au Burkina Faso et au Sahel.

Je vous remercie.