Burundi : L’impact des inondations (effets El Niño) - Flash Update No.3 (13 juillet 2024)

Attachments

Ce Flash Update est élaboré par OCHA, en coordination avec les partenaires humanitaires et les autorités du Burundi. Il couvre la situation à la date du 13 juillet 2024. La prochaine mise à jour sera produite dès la disponibilité de nouvelles informations.

FAITS SAILLANTS

  • Du 29 au 31 mai 2024, une mission d’évaluation rapide et multisectorielle des besoins a eu lieu dans 23 Communes les plus affectées par les récentes catastrophes naturelles (impacts du phénomène El Niño), sous la coordination de la Plateforme Nationale de Prévention des Risques et Gestion des Catastrophes (PFN-PRGC) et OCHA.
  • Sur 306 000 personnes ciblées par le Plan de Réponse aux inondations et à la montée du Lac Tanganyika, plus de 146 000 personnes ont été déjà atteintes par l’assistance multisectorielle avec un financement reçu de 6,3 Millions de dollars USD, soit 24,3% du budget requis (veuillez noter que certains financements n’ont pas encore été rapportés à FTS).
  • Des efforts de mobilisation de ressources pour la réponse continuent mais d’importants gaps persistent et le renforcement de la réponse est recommandé pour sauver les vies, diminuer les mauvaises stratégies d’adaptation en accroissement et renforcer la résilience des populations affectées, avant le début de la nouvelle saison des pluies de septembre 2024.

APERCU DE LA SITUATION

Malgré la baisse des précipitations durant la fin du mois de mai et le début du mois de juin 2024, les effets des chocs des mois antérieurs ont continué d’affecter les populations. L’évaluation multisectorielle rapide des besoins conduite du 29 au 31 mai dans vingt-trois Communes les plus affectées par les catastrophes naturelles, a identifié 248 869 personnes affectées, 49 365 personnes en déplacement interne, 47 décès, 78 personnes blessées, 22 660 maisons endommagées dont 10 729 détruites, 740 salles de classe, 32 structures sanitaires et 458 points d’eau endommagés. Les besoins prioritaires exprimés par les populations affectées sont l’alimentation, l’accès à l’eau et à l’assainissement, l’accès aux abris et articles ménagers et la protection. Ces besoins multisectoriels urgents sont recensés notamment dans les localités riveraines du lac Tanganyika très affectées ces derniers mois par les inondations, l’ouest, le nord et l’est du pays. Au mois de juin 2024, près de 200 individus ont été contraints au déplacement interne à la suite de vents violents dans la province de Makamba, ces nouveaux ménages déplacés viennent s’ajouter à la majorité des ménages affectés par les inondations et qui demeurent sans solutions d’abris dignes en plus d’avoir perdu tous leurs articles ménagers essentiels.

Le secteur de l’eau potable, hygiène et assainissement (EHA) fait partie des secteurs les plus touchés par des effets du phénomène El Niño qui aggravent les problèmes structurels du secteur en termes de faible taux de couverture d’accès à l’eau potable et l’assainissement. Dans le cadre du programme de relocalisation des personnes victimes de la montée des eaux du lac Tanganyika et de la rivière Ruzizi, de la localité de Gatumba vers le site de Mubimbi, le secteur EHA est confronté aux besoins en infrastructures d’eau et d’assainissement du site qui sont nettement supérieurs par rapports aux réponses en place sur le site. Des ajustements s’imposent pour améliorer les conditions de vies des personnes déplacées. De plus, les inondations ont exacerbé les facteurs sous jacents à la base de l’épidémie de choléra, d’où l’augmentation des cas dans les Districts Sanitaires de Isale et Bujumbura nord, qui étaient déjà en épidémie, ainsi que la propagation dans de nouvelles localités, notamment au sud du pays à Makamba et Rutana.

La sécurité alimentaire et les moyens d’existence ont été sévèrement affectés. Alors que dans plusieurs localités du pays les pluies de fin de saison culturale se sont arrêtées précocement dans la deuxième quinzaine du mois de mai 2024 et ce, avant la maturation des cultures de la saison, les localités sous inondations à la suite de la montée des eaux du lac Tanganyika ont continué à souffrir du retrait lent des eaux. A ce jour le niveau du lac est toujours largement au-dessus (>4m) du niveau normal. Par ailleurs tous les ménages fortement affectés par les pluies excessives (inondations et glissements de terrain) qui ont anéanti les récoltes de la saison, persisteront dans le besoin d’assistance alimentaire et avec l’espoir de s’en sortir avec les récoltes de la prochaine saison culturale 2025A au mois de janvier 2024. Selon les résultats de la dernière analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC, juin 2024) 1,2 million de personnes sont en situation alimentaire aiguë haute et ont besoin d’une action urgente de réponse. Parmi ces personnes, plus de 120 000 personnes ayant besoin d’une assistance d’urgence se trouvent dans les zones de moyens d’existence de l’Imbo et Crête Congo Nil qui sont les plus affectées par les inondations et glissements de terrain.

Dans le domaine de la santé, les effets du changement climatique marqué par de fortes pluviométries combinées à des chaleurs extrêmes constituent des conditions propices à la prolifération de maladies vectorielles comme le paludisme. Les communes de Bugabira, Kirundo, Ntega, Vumbi, Gashoho et Giteranyi connaissement actuellement une flambée de cas de paludisme avec un risque d’extension à d’autres communes. Une analyse faite sur les 24 premières semaines de 2024 montre une augmentation de 128 % par rapport à la même période en 2023. L’apparition précoce de la saison sèche laisse entrevoir un risque de survenue de flambées de cas de choléra surtout dans les communes situées sur le littoral du Lac Tanganyika pouvant s’entendre à d’autres localités. L’évaluation et la cartographie des risques sanitaires réalisées à l’aide de l’outil STAR de l’OMS en avril 2024, montre un risque élevé de survenues de flambées de cas de choléra durant la période de la saison sèche par manque d’eau potable dans 10 des 34 communes prioritaires à savoir Mutimbuzi, Muha, Mukaza, Ntahangwa, Rumonge, Bugarama, Gihanga, Mpanda, Bubanza, Rugombo et Bugarama. Pour faire face à cette situation et éviter une propagation des flambées de cas des pulvérisations intra-domiciliaires (PID) sont en cours dans les districts sanitaires de Muyinga, Gashoho, Kiremba et Vumbi.

Pour l’éducation, les faiblesses structurelles dont la faible résilience des infrastructures scolaires face aux aléas, des besoins en termes d’eau, hygiène et assainissement au niveau des écoles, le besoin des enseignants qualifiés et du matériel didactique qui reste très insuffisant, ont été exacerbés par les chocs climatiques. Suite à ces chocs, plus de 200 salles de classe détruites ou inondées, ont été contraintes de fermer précipitamment quelque temps, d’autres ont été délocalisées. Suite à la décision du Gouvernement du Burundi de délocaliser les habitants des quartiers inondés de Gatumba vers le site de Mubimbi, le nombre d’écoliers en besoin de réinsertion dans les écoles environnantes a continué à augmenter. Bien que les élèves aient été accueillis par les écoles avoisinantes du site, les difficultés ont été observés chez les plus petits du premier cycle qui n’étaient pas dans la possibilité de marcher sur une longue distance pour arriver à ces écoles dont certaines sont situés à 4 km et en terrain montagneux.

En ce qui concerne la protection de l’enfant, les effets du phénomène El Niño ont affecté plus de 9 380 enfants, dont plus de 5 070 filles, certains sont en situation de déplacement et viennent de 2 533 ménages hébergés temporairement dans les sites et communautés de Mubimbi, Gatumba, Gabaniro, Mutambara, Nyanza-lac et Rumonge centre. Malgré les efforts des acteurs de protection de l’enfant, des risques importants d’exposition des enfants aux abus, violences et exploitation persistent. Il s’agit principalement des zones avec un faible accès ou pas aux services holistiques de protection de l’enfance. Les enfants sont contraints aux activités qui les vulnérabilisent davantage dont le travail des enfants surtout la collecte de l’eau pour les plus jeunes et encourent des risques de violence sexuelle, les risques de la traite, etc.

En outre, la situation dans le secteur des abris et des articles non alimentaires reste préoccupante, les conditions de vie des populations déplacées sont précaires. Les abris d’urgence installés à Mubimbi ne remplissent pas les conditions minimales d’intervention en situation d’urgence, pour les abris. Ainsi, plus de la moitié des ménages relocalisés n’ont pas d’abris et sont colocataires, dans un espace réduit et par conséquent astreint à la promiscuité et aux risques y afférents. Cette situation est aussi répertoriée dans les communautés hôtes de Rumonge, Nyanza-Lac et localités proches de Gatumba. L’impact de la situation déclenchée par les effets d’El-Niño sur la sécurité foncière des ménages affectés continue à se faire ressentir. Selon les chiffres de la DTM, 95 000 personnes sont déplacées internes, parmi lesquelles 55% de femmes et d’enfants. Cette augmentation de plus de 35% depuis janvier 2024 exacerbe significativement l'insécurité foncière des personnes déplacées, nécessitant une réponse urgente et coordonnée afin de renforcer l'accès aux droits fonciers et préserver la dignité des personnes affectées.