Déclaration de Mme. Ursula Mueller, Sous-Secrétaire Générale des Nations Unies aux Affaires Humanitaires et Coordinatrice adjointe des secours d’urgence, N’Djamena, 27 février 2018

Ma visite au Tchad est la troisième et dernière étape de ma mission en Afrique centrale, afin de constater la situation humanitaire en République centrafricaine, au Cameroun, et ici. Je tiens tout d’abord à remercier l’accueil des autorités, de la communauté humanitaire et des populations tchadiennes.

Je me suis rendue ce matin dans la région du Lac, afin de constater l’impact de la crise du bassin du Lac Tchad. Du côté tchadien, plus de 500 000 personnes sont affectées, y compris 137 000 personnes déplacées, qui sont particulièrement vulnérables. Cependant, la crise a également affecté les communautés locales : la fermeture de la frontière avec le Nigeria depuis le début de la crise en 2015 et l’application continue de mesures d’urgence ont affecté les moyens d’existence des communautés, dans un contexte de faible développement régional, exacerbant ainsi leur vulnérabilité.

Au cours de ma visite, j’ai eu l’opportunité d’échanger avec les autorités, avec les communautés hôtes, avec les personnes déplacées et avec la communauté humanitaire. En me rendant à Yakoua, j’ai pu constater les conditions de vie difficiles et le manque de moyens de subsistance des communautés déplacées. Il est inacceptable que ces hommes, ces femmes et ces enfants qui ont tout perdu, leur maison, leurs biens, leurs moyens d’existence, et bien souvent des membres de leur famille, continuent de vivre dans la peur et l’incertitude. Ils ont besoin de solutions durables. Ils ont besoin d’appui pour retrouver une vie digne et indépendante. Egalement, je tiens à rappeler qu’il est de la responsabilité du Gouvernement, avec l’appui de ses partenaires, de créer les conditions favorables incluant la sécurité pour un retour volontaire des populations déplacées dans leurs villages d’origine.

J’ai été touchée par la solidarité des communautés hôtes, qui partagent le peu qu’elles ont avec celles et ceux qui ont tout perdu. Il est essentiel de renforcer les moyens d’existence de ces communautés, qui sont les premières à fournir une assistance à ceux fuyant la violence et l’insécurité.

La crise dans la région du Lac se déroule dans un contexte plus large de crises alimentaires et nutritionnelles récurrentes et de pauvreté dans tout le Tchad. Une personne sur trois a besoin d’assistance humanitaire dans tout le pays. Quatre millions de personnes sont incapables de subvenir à leurs besoinsalimentaires, et plus de 200 000 enfants de moins de cinq ans risquent de mourir de malnutrition aiguë sévère en 2018.

Au vu de l’ampleur des besoins, nos efforts sont insuffisants. Le financement des opérations humanitaires n’a pas suivi l’augmentation des besoins, particulièrement dans les régions affectées par les déplacements forcés et l’insécurité alimentaire au sud et à l’est du Tchad. Ce sous-financement a des conséquences humaines terribles. Face au manque de ressources, les acteurs humanitaires au Tchad ne peuvent couvrir l’ensemble des besoins et sont obligés de faire des choix difficiles. J’appelle à un engagement bien plus important des bailleurs de fonds pour répondre aux besoins humanitaires et de protection des 4,4 millions de personnes vulnérables dans tout le pays, y compris des réfugiés, des retournés tchadiens, des personnes déplacées internes, des communautés hôtes et des communautés locales.

Au-delà de l’assistance humanitaire, la chronicité des crises au Tchad et les défis de développement qui en sont les causes profondes nécessitent une approche intégrée entre action humanitaire et de développement. Je salue les efforts qui ont été faits par les partenaires présents ici afin d’opérationnaliser la « nouvelle façon de travailler » dans le pays, en collaboration avec les autorités. J’espère que cette dynamique de collaboration va s’intensifier afin de progresser vers une véritable complémentarité entre réponse aux besoins urgents, renforcement de la résilience des populations, et réduction des risques et des vulnérabilités à long terme.

Pour s’assurer que personne n’est laissé de côté, pour fournir une assistance vitale à celles et ceux qui en ont le plus besoin, pour réduire durablement les vulnérabilités des populations, plus de soutien de la communauté internationale est nécessaire au Tchad. C’est le message que je m’engage à porter sur la scène internationale.

Je vous remercie.