Discours de M. Stephen Tull, Coordinateur Résident du Système des Nations Unies et Coordinateur humanitaire au Tchad, à l’occasion du lancement du plan de réponse humanitaire 2018 - 9 février 2018

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Excellence, Monsieur le Ministre de l’Economie et de la Planification du développement,

Excellences, Mesdames et Messieurs les Représentants du Gouvernement et des peuples du Tchad,

Excellences, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants du Corps Diplomatique,

Mesdames et Messieurs,

C’est un plaisir pour moi d’être parmi vous aujourd’hui, aux côtés de Monsieur le Ministre de l’Economie et de la Planification du Développement, pour le lancement officiel du Plan de réponse humanitaire 2018.

Je salue les efforts de l’ensemble des partenaires qui ont contribué à l’élaboration de ce document conjoint. Basé sur une analyse commune des besoins humanitaires, le plan de réponse humanitaire est un outil clé pour notre planification conjointe. Cela nous permet d’orienter notre action vers les besoins urgents et prioritaires et de maximiser l’impact des interventions et des ressources, au bénéfice des personnes qui en ont le plus besoin au Tchad.

Mesdames et Messieurs,

Le plan de réponse humanitaire 2018 souligne que la situation est préoccupante. Malgré nos efforts, le Tchad continue de faire face à des crises humanitaires étendues qui exigent notre attention à tous.

4,4 millions de personnes, soit près d’une personne sur trois au Tchad, ont besoin d'aide humanitaire.

Ces personnes sont affectées par trois crises humanitaires majeures, à savoir l’insécurité alimentaire et la malnutrition, les déplacements forcés, et les urgences sanitaires. La dégradation de la situation alimentaire et nutritionnelle affecte 4 millions de personnes. Près de 900 000 personnes sont en situation d’insécurité alimentaire sévère. La prévalence de la malnutrition aigüe a augmenté, dépassant les seuils d’urgence dans de nombreuses régions. Douze régions sur 23 ont été déclarées en situation d’urgence nutritionnelle. Les déplacements de populations forcées de fuir les violences et l’insécurité continuent dans les zones frontalières, avec plus de 634 000 personnes en déplacement au sud, à l’est et à l’ouest du pays. Alors que le Tchad est un des pays avec le plus faible développement humain, c’est pourtant un des dix pays au monde qui accueille le plus de réfugiés, et le premier pays d’accueil en Afrique par rapport à la taille de sa population. Enfin, le dysfonctionnement des structures sanitaires et la faible couverture vaccinale limitent l’accès aux soins de santé pour plus de deux millions de personnes, augmentant le risque d’épidémies et d’urgences sanitaires qui sont source d’aggravation de la mortalité maternelle et infantile.

Face à ces multiples besoins humanitaires, le plan de réponse humanitaire cible les 1,9 million de personnes les plus vulnérables, et requiert 544 millions de dollars en 2018 pour leur apporter une assistance vitale.

Face à ces besoins en augmentation, les financements sont largement insuffisants et en diminution. Je suis déçu de constater qu’en 2017, le plan de réponse humanitaire du Tchad n’a été financé qu’à 45% (contre 53% en 2016), ce qui en fait un des dix plans les moins bien financés au monde. Cette situation est inexplicable et a des conséquences humaines catastrophiques. Tout en étant reconnaissant du soutien régulier et généreux de nos donateurs, j’en appelle à une mobilisation bien plus importante des partenaires techniques et financiers en 2018 et notamment à un élargissement du nombre de bailleurs et de partenaires qui appuient l’assistance humanitaire et investissent au Tchad : nous sommes tous concernés : les autorités bien sûr, les agences de l’aide humanitaire et du développement, le secteur privé, les banques multilatérales et l’ensemble des bailleurs de fonds. J’insiste sur le fait qu’assurer une réponse humanitaire à l’échelle des besoins identifiés est un prérequis essentiel pour le développement au Tchad. Le sous-financement actuel de la réponse humanitaire ne permet pas de maintenir les standards humanitaires minimums. Si nous ne sommes pas capables de répondre correctement aux besoins humanitaires, la situation risque de se détériorer dès cette année, surtout dans le contexte actuel de crise économique. Si rien n’est fait, il est probable que les vulnérabilités s’exacerbent et que les indicateurs sociaux se détériorent, ce qui repoussera encore plus la perspective d’atteindre les Objectifs de développement durable et la « Vision 2030 ».

Mesdames et Messieurs,

Ces besoins humanitaires sont hérités de vulnérabilités structurelles liées au faible développement du pays. La situation de pauvreté chronique fragilise les populations et affecte leur capacité à faire face aux chocs. Dans le contexte économique actuel, le manque d’investissement dans le développement local et dans les services sociaux de base pourrait entrainer, à terme, une plus grande vulnérabilité de la frange la plus pauvre et fragile de la société tchadienne, avec pour conséquence une augmentation des besoins humanitaires. Ce contexte justifie les efforts entrepris pour mettre en oeuvre la nouvelle façon de travailler au Tchad et adopter une approche intégrée humanitaire / développement afin de répondre aux besoins vitaux et aux causes profondes des défis persistants. Depuis 2016, nous avons progressé afin de renforcer les liens entre programmation humanitaire et de développement, créer des cadres de concertation – notamment le Forum Humanitaire-Développement dont nous préparons la prochaine tenue –, définir des résultats collectifs et identifier des priorités régionales communes. Plus que jamais, il est capital d’accélérer la mise en oeuvre de la nouvelle façon de travailler au Tchad, et que les partenaires de développement, et notamment les bailleurs de développement, s’impliquent aux côtés des organisations humanitaires afin d’encourager le développement local et l’accès aux services sociaux de base dans les zones affectées par les crises, sous la direction et la vision stratégique du Gouvernement.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Faisons tous preuve de la même solidarité dont font preuve les populations tchadiennes qui, même démunies, continuent d’accueillir les populations fuyant les violences et de partager leurs maigres ressources avec les plus vulnérables.

Je vous remercie pour votre attention.