Discours de Mme Mary-Ellen McGroarty, Coordinatrice Résidente et humanitaire des Nations Unies par intérim

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CONFÉRENCE POUR L'ÉLABORATION D'UN CADRE POUR UNE STRATÉGIE RÉGIONALE DE STABILISATION DES ZONES DE LA RÉGION DU BASSIN DU LAC TCHAD, AFFECTÉES PAR BOKO-HARAM

2 Novembre 2017, N'DJAMENA, TCHAD

• Excellence Monsieur le Premier Ministre et Chef du Gouvernement de la République du Tchad

• Excellence Monsieur le Commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’Union Africaine

• Excellence Monsieur le Secrétaire Exécutif de la Commission du Bassin du Lac Tchad, et Chef de Délégation de la Force Multinationale Mixte

• Excellences Mesdames et Messieurs les Ministres et Chefs de délégation des pays membres du Bassin du Lac Tchad et du Benin

• Honorables députés

• Mesdames et Messieurs les représentants des Institutions internationales et Organisations Non Gouvernementales

• Chers collègues du Système des Nations Unies

• Chers participants

• Distingués invités en vos rangs et qualités

C’est un grand plaisir et un honneur d’être parmi vous pour discuter de la façon dont nous pouvons travailler ensemble en vue de mettre en place des solutions durables face à la crise complexe du Bassin du Lac Tchad.
Définir un cadre collectif régional pour la stabilisation est une tâche essentielle et qui arrive à un moment opportun. Ce cadre doit inclure les actions humanitaires d’urgence en cours et intégrer celles liées à la construction de la paix et au développement dans toutes les zones affectées par la crise.

Au nom du Système des Nations Unies, je voudrais remercier l’Union Africaine et la Commission du Bassin du Lac Tchad pour une telle initiative. Je réaffirme ici notre engagement à accompagner ce processus essentiel.

Les Nations Unies et leurs partenaires sont activement engagés au côté des autorités nationales et locales, dans tout le Bassin du Lac Tchad.
Nous travaillons à soulager les souffrances de 2,3 millions de personnes contraintes de fuir leurs maisons. Nous soutenons la solidarité de millions de personnes, qui ont accepté de les accueillir dans leurs communautés et de partager avec elles leurs maigres ressources.

Dans les quatre (4) pays du Bassin du Lac Tchad, 154 organisations humanitaires, dont les agences des Nations Unies, les ONG nationales et internationales et le mouvement de la Croix Rouge, sont mobilisées pour répondre aux besoins. Grâce à nos programmes d’assistance, nos mécanismes de coordination et des contacts réguliers avec les communautés, nous disposons d’une analyse approfondie et à jour de la situation, des besoins multi sectoriels des aspirations des personnes déplacées et des communautés hôtes.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Sur la base de notre expérience et des interactions avec les populations affectées, nous constatons que la clef de la stabilisation de la région passe par le développement local. En effet, le faible développement et l’absence d’opportunités économiques ayant alimenté le conflit et la crise actuelle, des investissements dans le développement local, l’éducation et la création d’emplois vont contribuer à un redressement et une stabilité à long terme.

Bien sûr, nous avons besoin d’une approche réellement intégrée pour atteindre la stabilisation, qui inclut les interventions humanitaires, de développement, de sécurité et de maintien de la paix et qui soit séquencée et mises en œuvre en tenant compte de la situation propre à chacun des pays concernés.

Les acteurs en charge de la sécurité ont un rôle essentiel à jouer dans le processus de stabilisation. En parallèle à l’action militaire, assurer la protection des civils implique un renforcement de la police civile et de l’Etat de droit tant dans les zones de déplacement que dans celles de retour.
Le contexte régional actuel, marqué par l’insécurité persistante, des attaques contre les populations civiles et de graves violations des droits de l’homme, y compris celles basées sur le genre, exige une attention renforcée et une perspective globale par rapport aux questions de protection.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Au moment où nous sommes tous mobilisés vers l’avenir et la stabilisation du Bassin du Lac Tchad, nous devons avoir à l’esprit que les besoins humanitaires restent très élevés et ne vont probablement pas se réduire à court terme. En effet, nous ne devons pas oublier que dans le Bassin du Lac Tchad 10.7 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire dont 7.2 millions se trouvent en situation d’insécurité alimentaire sévère.

Ces personnes luttent chaque jour pour leur survie, l’accès à la nourriture, à l’eau et aux services santé de base. L’aide humanitaire a augmenté de façon significative, ce qui a permis d’atteindre plus de personnes grâce à plus de moyens. Mais davantage d’aide demeure nécessaire et les acquis restent fragiles.

Parallèlement au développement et aux opérations militaires, une réponse humanitaire forte et durable apportant un soutien vital aux plus vulnérables reste une priorité, y compris dans les régions les plus éloignées et difficiles d’accès.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Je m’exprime aujourd’hui pour insister sur l’urgence de la situation Une réelle stabilisation va nécessiter une ’action forte et un financement accru pour le développement en même temps que – et non à la place de – un accroissement du financement de l’action humanitaire. Pour faire face aux besoins les plus urgents jusqu’à la fin de cette année 2017, les agences des Nations Unies et les Organisations Non Gouvernementales ont besoin de $661 millions dans les quatre (4) pays concernés. Si nous ne répondons pas à leurs besoins vitaux maintenant, certains pourraient ne pas bénéficier des résultats de nos efforts de stabilisation.

Ensuite en vue de s’attaquer aux causes profondes de la crise nous devons accroître de manière significative l’action de développement. Au Tchad, l’Equipe Pays Humanitaire a défini avec les autorités locales une liste de priorités dans la région du Lac ; Cette liste met en exergue la nécessité d’encourager le développement local et d’améliorer les services sociaux existants tout en maintenant une réponse humanitaire adéquate.

La communauté humanitaire par ma voix, lance un appel urgent pour un engagement accru des acteurs du développement dans la région.

Trouver des réponses à long terme aux questions liées au déplacement sera crucial pour la stabilisation. Si des déplacements se poursuivent dans certaines zones du Bassin du Lac Tchad des dynamiques de retours sont également observées.

Pour mémoire, dans la Convention de Kampala et la Déclaration d’Abuja les gouvernements se sont engagés à faciliter les retours volontaires, et à assurer la sécurité et des conditions de vie digne dans les zones de retour, incluant notamment un renforcement des services sociaux de base, un accès à la terre et un soutien au développement des moyens de subsistance et les activités économiques Autant d’aspects pour lesquels les acteurs du développement ont un rôle clé à jouer aux cotés des gouvernements. Pour les personnes déplacées qui ne souhaitent pas retourner il est essentiel de promouvoir leur intégration au sein des communautés d’accueil.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Réfléchissons aussi ensemble sur un point crucial qui nécessite une approche régionale, à savoir l’intégration des personnes autrefois associées à Boko Haram.

Au Tchad, plus de 1 300 (mille trois cent) personnes se sont rendues ou déclarées victimes de Boko Haram, en majorité des femmes et des enfants. D’autres pays du Bassin du Lac Tchad sont confrontés à la même situation.

Il est essentiel de développer un processus pour traiter la situation de ces personnes ; un processus qui évalue leur profil, identifie leurs éventuelles vulnérabilités et assure leur réintégration dans la société. Je me réjouis des discussions en cours entre les Nations Unies et leurs partenaires pour avancer sur cette question.