DR Congo : Au cœur d’une crise humanitaire suffocante pour des millions de civils

Kinshasa, 7 juillet 2017 : Avec la moitié de ses 26 provinces touchées par les violences armées, les conflits intercommunautaires, les maladies et les catastrophes naturelles, tout ceci dans un contexte régional volatile et des moyens financiers les plus bas de ces dernières années, les six premiers mois de l’année 2017 ont prouvé que la République Démocratique du Congo demeure dans une crise humanitaire implacable à l’impact suffocant pour des millions de personnes.

A ce jour, la RDC compte 3,8 millions de personnes contraintes de fuir les violences à travers le pays, le rendant ainsi le pays africain abritant le plus grand nombre de déplacés internes. La population déplacée a ainsi augmenté de 60 pourcent par rapport aux 2,2 millions enregistrés il y a six mois. Sur ces 3,8 millions déplacés internes, le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires estime qu’un tiers d’entre eux – soit 1,3 million – sont déplacés à cause de la crise qui ravage la région du Kasaï. Outre les déplacés internes, le pays fait aussi face à un flux permanent de réfugiés provenant de ses voisins, notamment du Burundi, de la République Centrafricaine et du Soudan du Sud.

Les perpétuels conflits intercommunautaires dans le Nord-Kivu, le Sud Kivu et le Tanganyika ont entraîné la mort de nombreux civils ainsi que le déplacement d’un demi-million d’autres durant les 12 derniers mois. Le choléra et la rougeole surgissent fréquemment tandis que le paludisme connaît une ascension toujours croissante. Durant les six premiers mois de 2017, plus de 38 000 cas de choléra, fièvre jaune et rougeole ont été enregistrés et plus de 700 personnes en sont mortes, des chiffres supérieurs aux plus de 32 000 cas dont 670 morts enregistrés au second semestre de 2016. La malnutrition, liée fortement à l’insécurité et aux mouvements de populations, prend aussi de l’ampleur, avec près de deux millions d’enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère. Malgré la présence de plusieurs groupes armés, l’Ituri reste “la province oubliée” de la RDC. En effet, ces deux dernières années, la plupart des ONG se sont progressivement retirées de l’Ituri au profit d’autres provinces. Alors que la résurgence de la fièvre à virus Ebola dans le Bas-Uélé a récemment causé la mort de 4 personnes, la déclaration de la fin de l’épidémie reste l’une des rares bonnes nouvelles des six mois écoulés.

Alors que les populations civiles payent le plus lourd tribut de la violence, les acteurs humanitaires des Nations Unies et des organisations non-gouvernementales se heurtent à des contraintes d’accès aux communautés affectées. Des personnels médicaux ont été tués, d’autres pris en otage ; des hôpitaux et des centres de santé ont été attaqués et pillés, classant ainsi la RDC parmi les zones les plus dangereuses au monde pour les acteurs humanitaires.

Cette crise de protection peu reluisante est aggravée par des ressources financières insuffisantes. Un appel de 748 millions de dollars qui a été lancé en début d’année est, jusqu'à présent, financé à moins de 25 pourcent, le plus bas niveau de financement des 10 dernières années. De plus, à la fin du mois d'avril, un appel d'urgence de 64,5 millions de dollars a été lancé exclusivement pour la crise de la région du Kasaï. A ce jour, il n'a reçu que 11 pourcent de contribution.

“La crise de la RDC est une succession de chocs aigus qui ont érodé la dignité de millions de personnes, et les six premiers mois de l'année n'étaient pas différents. La crise de la région du Kasaï est aujourd'hui le point le plus visible mais à travers le pays, la vie de millions de personnes a été rendue misérable par la violence qui ne dit pas son nom, le manque d'accès au service social de base et à la pauvreté. Nous pouvons redéployer notre personnel, proposer de nouvelles compétences, distribuer de la nourriture et des médicaments aux quatre coins du pays, mais sans argent, nous ne serons pas en mesure de répondre comme nous le souhaitons”, a déclaré le chef de bureau par intérim d’OCHA, Alain Decoux.

Le Fonds Central des Nations Unies pour les interventions d’urgence (CERF), le Fonds Humanitaire RDC ainsi qu’une poignée de donateurs ont répondu aux deux appels de fonds ce qui a permis le lancement des opérations. Cependant, “ nous avons besoin de beaucoup plus de moyens financiers »”, a dit Decoux.

Considérant la crise du Kasaï comme la plus grande des urgences, les acteurs humanitaires ont été contraints de déployer des membres de leur personnel détachés des opérations en cours, mettant ainsi à mal la réponse dans d’autres provinces du pays dont la situation déjà critique ne cesse de se détériorer.

“Sauver et protéger des vies reste notre unique objectif. Notre capacité à y parvenir dans les mois à à venir dépend largement de la générosité des donateurs et de notre capacité collective à dire au monde entier que la crise humanitaire en RDC demeure une crise majeure”, a conclu Decoux.