RD Congo : Focus Humanitaire Août/Aug 2007

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La problématique de l'accès en RDC

Introduction

Un des grands défis de l'assistance humanitaire en République Démocratique du Congo reste l'accès aux personnes vulnérables. Celui-ci est souvent entravé par les conditions sécuritaires ou encore par les conditions physiques des routes et des ponts à travers le pays. A travers ce numéro, nous vous proposons un panorama - certes pas exhaustif - de la problématique d'accès à travers le pays.

En Ituri, depuis la ''guerre de libération'' menée par l'Alliance de Libération du Congo (AFDL) en 1996, le district a plongé dans un cycle de violence presque sans fin. L'insécurité est telle que seuls 30 % du territoire sont actuellement accessibles par les humanitaires. Les escortes militaires de la MONUC sont parfois nécessaires pour convoyer de l'assistance.

De même dans les 2 Kivu, l'escorte est parfois utile. La présence et l'activisme des groupes armés continuent à restreindre l'espace humanitaire. De récents affrontements entre des groupes armés ont amené certains acteurs humanitaires à se retirer de certains axes dans le Sud- Kivu. Mais malgré tout, on note une amélioration de l'accès même si pour certains territoires comme Shabunda, la seule voie reste la liaison aérienne. Dans le Nord-Kivu, la préoccupation sécuritaire demeure la principale source de soucis, au-delà des contraintes physiques.

Ailleurs, dans le pays, la dégradation de l'état physique des voies d'accès constitue le goulot d'étranglement.

Sylvestre Ntumba M.

L'accès : un obstacle à l'assistance humanitaire en RDC

Dans la partie Centre et ouest de la République Démocratique du Congo, l'accès à plusieurs localités demeure un sujet de préoccupation. Tout récemment lors de la dernière campagne de vaccination de routine du Programme Elargi de Vaccination (PEV), l'équipe de vaccinateurs qui s'est rendue à Monkoto, District de la Tshuapa, dans la province de l'Équateur, a dû mettre 4 jours par pirogue motorisée pour partir de Mbandaka à Monkoto. Soit une distance d'environ 400 Km. Et de là, joindre certaines localités à pied.

Les routes dans cette province sont tellement dégradées qu'il faut une combinaison de moyens (véhicules, pirogue, hors-bord, vélo, moto) pour pouvoir se déplacer.

Une combinaison qui n'est pas à la portée du premier venu. Cette situation ne gêne pas seulement les acteurs humanitaires dans leur action mais contribue aussi à enclaver davantage certaines contrées les privant ainsi de la possibilité de procéder à des échanges des biens et, par conséquent, de se prendre en charge, laissant les populations de ces contrées à la merci de l'assistance.

Une mission d'évaluation de la situation humanitaire (agences des Nations Unies et ONG) qui s'est rendue dernièrement dans le District de la Tshuapa, dans la province de l'Equateur l'a appris à ses dépens. La mission n'a pas pu se rendre de Monkoto à Bongandanga (environ 300 km) pourtant prévu sur l'itinéraire à cause de l'état de la route.

La province de l'Equateur n'est pas un cas unique. Dans le Bas-Uélé, dans la Province Orientale, parcourir, par exemple, 200 km de Buta, chef-lieu, à Dingila relève d'un véritable parcours de combattants. Il faut jusqu'à 14 heures pour couvrir environ 200 km qui séparent les deux cités. Des exemples peuvent être multipliés aussi dans les provinces du Kasai Oriental, du Kasai Occidental et du Maniema.

A travers les provinces, beaucoup de ponts sur différents axes se limitent à des troncs d'arbre qui enjambent les rivières. Les véhicules sont souvent contraints à des passages à gué pendant la saison sèche, opération qui n'est pas possible pendant la saison de pluies. Ce qui laisse la place au vélo et à la moto. L'entretien des routes ne suit pas.

Face à cette situation, le Cluster Logistique à la suite d'une série de réunions a retenu comme entraves à l'assistance humanitaire aux personnes vulnérables notamment l'absence d'infrastructures, l'insuffisance de l'offre commerciale et le manque d'équipement de la Société Nationale de Chemin de Fer (SNCC). En réponse à ce constat, le cluster a planifié par exemple pour cette année la réhabilitation de 1247 Km de route dans l'Est de la RDC (Nord-Kivu, Sud-Kivu et Katanga).

Pour réussir ce pari, le Cluster Logistique a besoin de plus de 15 millions de dollars américains. Au moins la moitié de cette somme a déjà été collectée essentiellement du Fonds Central d'Intervention d'Urgence (CERF). A cet effet, le PAM, chef de file de ce cluster, a noué un partenariat avec le Bureau des Nations Unies pour les Services d'Appui aux Projets (PNUD/UNOPS), l'Office des Routes et des Organisations Non gouvernementales. Tout cela, avec le concours des bailleurs de fonds notamment la Banque Mondiale et l'Union Européenne.

Le Pooled Fund - un fonds mis à la disposition du Coordonnateur Humanitaire pour financer des projets qui cadrent avec le Plan d'Action Humanitaire - a, dans sa première allocation de cette année, mis à la disposition de 11 projets plus de 5 millions de dollars américains pour la réhabilitation de certains axes à travers le pays.

Ainsi, par exemple, avec le financement Pooled Fund, le PNUD/UNOPS lance au courant de ce mois d'août des travaux de réhabilitation de l'axe devant permettre l'accès au territoire de Dekese, dans le District du Kasai, dans la province du Kasai Occidental. Les travaux comprennent la réouverture d'une voie de 80 km (de Domiongo à Lodi) et la réhabilitation d'un bac à moteur (d'une capacité de 20 T) à Lodi sur la rivière Sankuru. Ce projet financé par le Pooled Fund vise à soutenir les efforts des acteurs humanitaires. La fin des travaux devrait intervenir au milieu de l'année prochaine.

De même du côté de la Province du Maniema, le Pooled Fund finance les travaux en cours de réparation d'un bateau et de 2 barges. Tous ces travaux visent la réouverture du trafic fluvial entre Kindu, au Maniema, et Ubundu, dans la Province Orientale. Soit environ 300 Km. Ce bateau et ses 2 barges permettront de désenclaver davantage la province avec le transport entre la Province Orientale et le Maniema de 100 à 200 tonnes. Par ailleurs, le Quick Impact Project (QIP) de la MONUC s'attelle à la réhabilitation de 2 grues au port de Kindu.

Tous ces efforts tendent à remédier à la situation des transports en RDC qui, aujourd'hui, est telle qu'il faut parfois (et parfois souvent dans certaines parties de la république) recourir au transport aérien. Ce qui augmente considérablement le coût de l'assistance humanitaire.

Mais pour gagner la bataille de la réhabilitation des routes et des ponts, l'État congolais devrait prendre sa part.

Sylvestre Ntumba Mudingayi