RD Congo: Situation humanitaire dans la province du Nord-Kivu (13 juin 2024)

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Ce rapport est produit par OCHA RDC en collaboration avec les partenaires humanitaires. Il couvre la période du 1er au 31 mai 2024.

FAITS MAJEURS

  • L’escalade de violences continue dans les territoires de Masisi et Rutshuru.

  • Explosions de bombes dans des sites de déplacés à Goma, 35 morts et 37 blessés.

  • Plus de 247 000 personnes ont reçu une assistance alimentaire dans le Nord-Kivu.

CHIFFRES CLÉS

2,7M personnes déplacées internes au Nord-Kivu, avril 2024 (Source : CMP Nord-Kivu, avril 2024)

1.34M personnes retournées au Nord-Kivu, avril 2024 (Source : CMP Nord-Kivu, avril 2024)

2,6M personnes en insécurité alimentaire, IPC3+ (Source : Analyse IPC de l’insécurité alimentaire aigue juillet 2023-juin 2024)

APERÇU DE LA SITUATION

Territoire de Masisi

Le mois de mai 2024, a été marqué par une recrudescence des affrontements armés dans le territoire de Masisi.

Ces violences ont engendré de nouveaux déplacements massifs de populations, accentuant ainsi une situation humanitaire déjà précaire dans la région. Entre le 1er et le 9 mai, des assauts ont été lancés contre les forces armées congolaises dans la cité de Rubaya et ses environs (Bihambwe, Kibabi, Ngungu). Cela a entraîné le déplacement d'environ 39 000 personnes vers le site de Nzulo et d'autres localités au Sud-Kivu.

Depuis le 13 mai, les combats se sont intensifiés dans plusieurs axes de la zone de santé de Masisi, exposant plus de 40 000 personnes déplacées à Masisi Centre à de nouveaux risques de déplacement.

Des villages entiers, notamment dans les groupements de Buabi et Ufamandu 1er, se sont vidés de plus de 60 % de leurs habitants. Ces derniers ont fui vers Walikale et le Sud-Kivu.

Dans le groupement Muvunyi Kibabi, les combats sur les collines surplombant la cité de Saké ont contraint plusieurs centaines de ménages à se déplacer vers les sites installés sur l'axe Goma-Saké.

Au total, des acteurs humanitaires estiment que plus de 100 000 personnes ont été forcées à des déplacements multiples dans le territoire de Masisi depuis le dernier trimestre 2023. Plus de 400 000 personnes demeurent encore en situation de déplacement dans ce territoire, soit environ 14,5 % du total des personnes déplacées dans la province du Nord-Kivu.

Territoire de Rutshuru

Après une brève accalmie, de violents affrontements ont repris depuis le 5 mai dans plusieurs villages de la zone de santé de Kibirizi.

Ces violences ont engendré de nouveaux déplacements massifs de population et contraint des organisations humanitaires à suspendre leurs activités. Les combats ont notamment eu lieu sur les axes Kibirizi-Bwalanda, Kikuku-Kanyabayonga et Rwindi-Kanyabayonga.

L'intensité des combats près de Kanyabayonga a contraint plusieurs organisations humanitaires à suspendre leurs activités sur place. Le 30 mai, une organisation humanitaire a suspendu une assistance en vivres qui ciblait plus de 58 000 personnes déplacées à Kanyabayonga. Plus de 27 000 personnes ont désormais un accès limité aux soins de santé à l'hôpital général de référence de Kibirizi.

Près de 500 personnes, dont 40 ex-combattants et 50 survivants de violences basées sur le genre, ont vu leur prise en charge en protection et santé mentale interrompue.

Plus de 4 800 ménages qui étaient retournés à Kibirizi en avril ont été contraints à un nouveau déplacement, principalement vers Kanyabayonga, Nyanzale et Kirima.

Des barrières sécuritaires illégales érigées par des groupes armés sur l'axe Kiwanja-Ngwenda-Ishasha renforcent le sentiment d'insécurité et découragent les retours, même dans des zones relativement calmes comme la chefferie de Bwisha.

Territoire de Beni

Au moins 10 civils tués par des armes à feu dans la soirée du 9 mai à la suite d’une attaque contre le village de Matumbi, à 10 km de Mbau. L’infirmier titulaire et le comptable de l’aire de santé de Pasala étaient parmi les victimes de cet incident attribué à des présumés ADF, après plusieurs mois d’accalmie.

Une organisation humanitaire qui appuyait l’aire de santé de Pasala a été contrainte de suspendre ses activités en santé, nutrition et protection à la suite de la dégradation de la situation sécuritaire. Cette assistance était destinée à plus de 30 000 personnes dans les aires de santé de Pasala, Musuku et Totolito. Des sources sécuritaires indiquent que plus de 2 000 habitants auraient fui leurs villages vers des localités jugées plus en sécurité.

On note également une augmentation de la criminalité dans la ville de Beni et sa périphérie. Par ailleurs, le 3 mai, la découverte de plusieurs corps sans vie a fait monter de trois à 12 morts, le bilan d’une attaque survenue le 28 avril à Mangina. La situation de protection des civils s’est également détériorée sur l’axe Eringeti – Kainama où des présumés ADF auraient enlevé une femme et blessé deux autres personnes dans des embuscades tendues dans les localités de Mayi Safi et Bunake.

Ville de Goma et territoire de Nyiragongo

Le 3 mai, des explosions de bombes dans quatre sites de déplacés sur l’axe Goma - Saké ont fait 35 morts et 37 blessés dont 27 graves, selon un bilan officiel des autorités provinciales. Les bombes larguées lors des affrontements entre un groupe armé non-étatique et les FARDC dans les environs de la cité de saké ont également causé d’importants dégâts matériels dans quatre sites de déplacés sur l’axe Goma – Saké abritant plus de 10 500 personnes.

La petite criminalité reste aussi d’actualité dans la ville de Goma. Des nombreux cas de cambriolage de domiciles privés la nuit par des hommes en armes ont été rapportés dans plusieurs quartiers de la ville de Goma, notamment les quartiers populaires de Himbi, Katoyi et Kyeshero, selon plusieurs sources sécuritaires. Des hommes armés ont aussi tué deux personnes déplacées le 14 et 19 mai dans le quartier Lac vert ainsi que dans le site de déplacées de Nyakabanda. La multiplication des cas d’assassinat de personnes déplacées par les hommes en arme incontrôlés exacerbe la frustration au sein de la population déplacée.