RDC: Le train de l'espoir arrive à Kindu

La population en rêvait, la communauté humanitaire l'a réalisé. Le train devant relier le Kantanga au Maniema est arrivé à Kindu mardi dernier après cinq jours de voyage.
Une foule s'était pressée à la gare de Kindu, chef-lieu de la province du Maniema, à l'est de la République Démocratique du Congo (RDC), pour accueillir ce train de l'espoir qui ne circulait plus depuis six ans en raison de la guerre.

«Le train est arrivé, fini la faim, le chômage, nous étions déjà comme des prisonniers qui ne pouvaient plus quitter la province, c'est une vraie libération », pouvait-on entendre dans les acclamations de la population.

L'arrivée de ce train représente en effet une délivrance pour ces populations affectées par la guerre, coupées d'une massive assistance humanitaire et écartées de tout développement économique. «Désormais nous aurons du sel, du sucre. Nous ne transporterons plus nos produits des champs sur les dos depuis le sud Maniema jusqu'à Kindu. Nous pouvons maintenant espérer vivre comme dans les autres coins de ce pays », s'est réjouie une femme en voyant le train.

Cet événement a donc été marqué, à Kindu, d'une cérémonie inhabituelle rehaussée de la présence du vice-président de la RDC en charge des affaires sociales et culturelles, des ministres du transport, de la communication, de l'énergie et de l'enseignement supérieur, du secrétaire particulier et du porte-parole du chef de l'Etat, ainsi que d'un délégué de l'ambassade des Etats-Unis, sans oublier les acteurs directs qui ont contribué au succès du projet, à savoir notamment USAID pour le financement, le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA), des Agences du Système des Nations Unies et des ONG.

Ce train n'était pourtant qu'inaugural. Une distribution symbolique de produits de première nécessité a toutefois été effectuée lors des passages aux différentes gares. Une remise symbolique de sel et de sucre, annonciatrice de l'arrivée prochaine d'une aide humanitaire de plus grande ampleur.

Cinq wagons d'aide humanitaire

Un deuxième convoi humanitaire a en effet quitté Lubumbashi, chef-lieu de la province du Katanga le 26 juin. Cinq wagons retiennent l'assistance humanitaire du Fonds des Nations Unies pour l'Enfance (UNICEF), de Care International et de Caritas, qui sera distribuée aux personnes vulnérables de Kabalo-Kindu.

Les populations déplacées de guerre au nord du Maniema et de Kampene se partageront dans les jours à venir 2000 kits de biens non alimentaires fournis par l'UNICEF alors que 90.000 personnes particulièrement vulnérables recevront une assistance d'urgence comprenant des couvertures, des batteries de cuisine, des bâches du savon, et du fil. L'aide sera distribuée par son partenaire opérationnel Catholic Relief Services (CRS).

Quant à Care International, ce sont 19 tonnes de matériaux de construction qui sont acheminées par ce train. L'ONG prévoit ainsi de réhabiliter huit centres de santé dans des zones rurales de santé du Maniema, à Kasongo, Kunda, Kibombo et à Lusangi.

Caritas apportera pour sa part, avec le train, une aide alimentaire en sel et en sucre ainsi qu'en semences, outils aratoires, matériels de pêche et en médicaments à des populations de Kasongo, Kindu et Kongolo que la guerre avait entièrement enclavées.

L'opération Kambelembe : un processus de longue haleine

Le succès de cette opération appelée « Kambelembe », signifiant hirondelle mais qui est également le nom donné en langage vernaculaire à la population du Maniema eu égard à sa réputation de joyeuseté, de légèreté comme cet oiseau annonciateur de jours meilleurs dans l'imaginaire populaire, a été le résultat d'un long processus depuis 2001, période o=F9 le pays était encore divisé par la guerre. L'idée de restaurer cette voie ferrée avait ainsi germé dans l'esprit des responsables du Programme Alimentaire Mondial (PAM) afin de pouvoir venir en aide aux populations vulnérables localisées entre Kabalo / Kindu et Kabalo / Nyemba.

A partir de 2001, OCHA a été contacté par la SNCC à Kindu et par des partenaires, afin de développer un plaidoyer en faveur de la réouverture de ce trafic ferroviaire. En avril 2002 se tenait le premier atelier organisé par OCHA o=F9 les experts de la SNCC Lubumbashi, Kindu et Kalemie s'étaient rencontrés dans le but de mener une étude sur la faisabilité du projet.

Les travaux s'annonçaient titanesques et périlleux. La guerre battait son plein, les chefs militaires tenaient à leurs positions. La voie ferrée avalée par la végétation était pratiquement invisible à certains endroits alors que les fonds nécessaires n'avaient pas encore été mis à disposition.

Pourtant après maintes rencontres orchestrées par OCHA, USAID s'est déclaré disposer à financer ce projet à hauteur de 1,3 millions de dollars.

L'ONG, Catholic Relief Services (CRS), a soutenu ce financement en déboursant 200 000 dollars dès le début des travaux, alors que les démarches de OCHA ont permis d'obtenir de la Belgique, en février, un financement de 1,5 millions d'euros pour la reconstruction du pont de Nyemba. Les travaux devraient normalement se terminer cette année.

La réhabilitation des 491 km de voie ferrée a été réalisée par quatre ONG : Care International, Concern, Caritas/Congo et Food for the Hungry International. Ces travaux ont consisté globalement dans la restauration du pont Zofu par la Compagnie Congolaise de Construction (CCC), le nivellement de la voie, l'ouvrage d'art, la reconstruction des banquettes à quelques endroits, le remplacement des buses et de quelques traverses de ponts, le curage des fossés, le désherbage, le déboisement et la réhabilitation des gares.

« La réussite de ce projet est le résultat d'une synergie de tous les efforts déployés aussi bien par les autorités congolaises, le Système des Nations Unies, les ONG que les bailleurs de fond. L'arrivée du train matérialise ainsi cette volonté commune et démontre une fois de plus qu'ensemble, et pour le bien des personnes vulnérables, les projets les plus ambitieux ont un avenir, » a déclaré David Cibonga, officier de liaison à OCHA /Kindu.

La voie étant maintenant ouverte, les prochains convois achemineront de l'aide humanitaire dans les localités le long de la voie ferrée. Une voie ferrée qui contribuera également au retour des déplacés internes de guerre, isolés depuis des années.