RDC: Un projet de loi sur la nationalité en vue d'unifier le pays
En réaffirmant avec force le droit du sol
et le droit du sang, déjà stipulés dans l'ancienne loi de 2001, le nouveau
projet de loi sur la nationalité pourrait être un facteur d'unité et de
pacification du pays après les événements survenus à l'Est, a estimé mercredi
Edouard Mpongo, professeur de droit constitutionnel à l'université de Kinshasa.
Ce texte, adopté lundi par le Conseil
des Ministres en République Démocratique du Congo (RDC), prévoit en effet,
sous certaines conditions, que sera congolaise la personne née sur le territoire
national (droit du sol) ou rattachée à un national par un lien de filiation
(droit du sang). Le projet sera discuté par les parlementaires lors de
la session extraordinaire qui vient de s'ouvrir le 12 juillet dernier.
" C'est un bon projet car il résout automatiquement le problème lié aux populations Banyamulenge à l'Est, dont la nationalité congolaise est contestée par certains ", a précisé le professeur.
Des affrontements, justifiés par des considérations ethniques, avaient en effet secoué cette partie du territoire à la suite de la prise de Bukavu, au mois de juin, par des militaires congolais insurgés.
" Ce projet est donc un signal fort marquant une volonté d'unité nationale ", a ajouté M. Mpongo. Pour le secrétaire exécutif du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), Francis Bedy, ce projet " mettra fin une fois pour toute aux difficultés, notamment présentes à l'Est, car les affrontements sont liés à la nationalité ".
Un projet de loi inclusif
Le texte gouvernemental reprend les principes de base dictés par l'article 14 de la Constitution de Transition du 4 avril 2003, a affirmé mercredi Henri Mova Sakanyi, porte-parole du gouvernement.
En vertu de cette disposition " la nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec une autre nationalité ".
Dans ce cadre, le projet distingue deux options, a précisé le porte-parole : La nationalité d'origine et la nationalité par acquisition.
Concernant la nationalité d'origine, le projet consacre à nouveau le droit du sang et le droit du sol.
Un enfant sera ainsi congolais s'il est né de père ou de mère congolais.
De plus et conformément à la Constitution, l'enfant acquerra la nationalité congolaise s'il appartient à un des " groupes ethniques et nationalités dont les personnes et le territoire constituaient ce qui est devenu le Congo, (présentement la RDC) à l'indépendance ". La nationalité, telle que définie dans le projet de loi, s'étendra ainsi à la descendance de ses personnes par voie de filiation maternelle ou paternelle, a précisé le porte-parole.
La nationalité congolaise pourra également être accordée 'par acquisition'. Le candidat conservera son statut d'étranger jusqu'à ce qu'il obtienne sa nouvelle nationalité par naturalisation, option, adoption, mariage ou résidence.
Ainsi, un enfant né sur le sol congolais d'un père et d'une mère non congolais pourrait demandé la nationalité congolaise à sa majorité. La résidence sur le territoire national offrira la possibilité après un certain temps de demander la nationalité, de même dans l'hypothèse d'un mariage entre une personne étrangère et une autre, congolaise, a expliqué le porte-parole.
Pour ce dernier, toutes les personnes actuellement présentes en RDC sont éligibles au statut de congolais pour peu qu'elles rentrent de le cadre que les parlementaires finaliseront
Le germe de l'opposition au projet
Le projet de loi ne semble cependant pas faire l'unanimité. Le parti Lumumbiste initié, de l'opposition politique, a d'ores et déjà soulevé le problème de la compétence du parlement à légiférer.
" Même s'il l'on peut être d'accord sur le fond, une loi sur la nationalité ne peut émaner que d'un parlement démocratiquement élu. La solution au problème des nationalités doit se trouver dans le cadre de la légalité Républicaine ", a déclaré mercredi Adolphe Muzito, secrétaire général de ce parti.
La compétence de cette institution est pourtant clairement identifiée dans la Constitution de Transition qui réglemente le fonctionnement et l'organisation de l'Etat jusqu'à la tenue des élections à tous les niveaux d'ici juillet 2005. Une loi sur la nationalité est par ailleurs une des conditions préalables à toutes opérations électorales.
Des parlementaires issus du parti présidentiel, le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie, ont quant à eux exprimé dans les couloirs du parlement leur opposition à une attribution massive ou collective de la nationalité congolaise par le biais de ce texte.
Enfin, et même s'il s'agit d'un principe constitutionnel, l'imposition d'une nationalité exclusive est contestée par une partie de l'opinion, dont le professeur Mpongo, favorable à la faculté de jouir d'une double nationalité.
Face à cette épineuse problématique, le président de l'Assemblée Nationale, Olivier Kamitatu Etsu, a appelé députés et sénateurs à débattre de cette question " avec un sens élevé de la responsabilité dans le souci de préserver la paix, l'unité et la cohésion nationale ".