Point de presse du Coordonateur Humanitaire au Niger

Merci de répondre à ce point de presse qui suit immédiatement la réunion du comité ad-hoc de gestion et suivi de la crise alimentaire. Je crois que les mécanismes de réponse se mettent en place, notamment au niveau de la coordination des agences, les mécanismes sont en train de se renforcer de façon remarquable. Nous avons effectivement sept groupes techniques composés d'agences des Nations Unies, ONG, et surtout des départements gouvernementaux qui sont en même temps chef de file et agents de mise en œuvre, donc la coordination entre la communauté humanitaire et les services étatiques se renforce, ce qui est un point de satisfaction. Un deuxième élément de satisfaction est la quantité d'aide qui parvient au pays, mais nous rencontrons encore des difficultés au niveau logistique. Nous n'avons pas encore -physiquement- tous les quantités disponibles dans le pays. En ce qui concerne la distribution des aides, une fois encore, certains facteurs logistiques retardent la mise en place des aides, mais nous avons vu dans le courant de la semaine une accélération de la distribution des aides. Nous souhaitons attirer l'attention des medias, du peuple nigérien, de la communauté internationale sur les mécanismes de suivi en termes d'impact car nous avons l'obligation de mesurer cet élément et de rendre compte au peuple nigérien et à la communauté internationale. Le système de suivi d'impact doit impliquer les autorités et les responsables administratifs. J'invite également toute structure extérieure, non-gouvernementale ou appartenant au système des Nations Unies, à mener ces opérations en concertation avec les autorités locales de façon qu'on puisse s'assurer de la bonne réussite de ces opérations et rendre compte au gouvernement et au peuple. Le constat qui peut être fait aujourd'hui est que les instances de concertation sont en place. Je soutien un approfondissement de ces instances en impliquant les communes et les villages qui sont les principaux bénéficiaires des aides qui leurs sont fournies.
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Q : Quel aide a été reçue depuis le départ de Secrétaire General Kofi Annan ? Quelles sont les poches ou l'aide n'a pas encore été distribuée ?

Nous avions reçu des intentions d'aide avant son arrivée, mais ce qui est important à souligner est que nous disposons aujourd'hui d'un montant réel d'environ 35-36 millions de dollars US. Nous n'avions pas ce montant avant sa visite. Lorsque nous avons lancé l'appel le 4 août, les promesses de contributions se situaient à USD 25 millions. Mais il ne faut pas cacher la réalité car nous avons seulement atteint 50% du montant dont nous avons besoin.

Q : Suite aux critiques soulevées par certaines ONG, quelles améliorations ont été apportées par le système des Nations Unies au mécanisme de coordination ?

Je dirai d'abord que la coordination de l'aide n'a pas commencé au mois d'août. Nous avons un dispositif national de prévention des crises alimentaires qui coordonne avec les structures étatiques et la communauté internationale dans la prévention et la gestion des crises. Le système onusien a renforcé ces effectifs pour faire face à la crise et à mis en place un bureau qui doit appuyer le gouvernement dans la coordination de la crise. A un certain point, l'ONU a été accusé de n'avoir pas répondu à temps ou de manière appropriée à la crise. Cependant il faut souligner qu'en novembre dernier, nous avions des estimations sur la crise, des programmes et des mesures ont été mises en place mais elles n'ont pas été suffisantes pour éviter cette crise. En mars et mai, nous avons lancé des appels à l'aide humanitaire, certains membres de la communauté internationale considèrent que les problèmes du Niger sont des problèmes structurels et donc ne concernent pas l'humanitaire. Ainsi jusqu'à la diffusion des images d'enfants malnutris sur les écrans du monde occidental, il n'y a pas eu de réponse. Le Sahel subit une crise à travers laquelle les facteurs structurels se confondent aux facteurs conjoncturels et socioculturels, ainsi nous avons des fluctuations constantes autour d'un état de crise presque permanent. Le Sahel est une région où le développement et l'action humanitaire doivent pouvoir coexister.

Q : Quel est le nombre d'enfants admis dans les structures nutritionnels ?

54,365 enfants ont été admis dans les différents centres nutritionnels depuis le 1er juillet. Je voulais aussi corriger un chiffre que nous avons donné la semaine dernière concernant le nombre de centres nutritionnels. Il y a 307 centres qui sont opérationnels. Nous prévoyons 760 d'ici la fin de l'année.

Q : Quel est actuellement l'ampleur de la situation ?

Il y a deux facteurs à tenir en considération, nous avons une crise alimentaire et une crise nutritionnelle. Concernant la crise alimentaire, la situation s'améliore grâce aux aides alimentaires qui sont distribués et du fait également que dans certaines régions la récolte a déjà commencé. Le mois de septembre sera le mois de plus crucial car la population aura épuisé son stock de survie et dépendra presque exclusivement sur l'aide alimentaire fournie, c'est dans ce sens que le Secrétaire General [Annan] s'exprimait quand il disait que la situation risque de s'aggraver si les aides alimentaires ne sont pas distribuées à temps. Concernant la nutrition, tous les centres de santé étant payants, les mères qui ont besoin d'aide se tournent vers les ONG, ce qui risque de faire augmenter le nombre d'admis dans les centres nutritionnels. Nous comptons lancer avec le Ministère de la Santé un fond de solidarité qui sera financé par les bailleurs de fonds et prendra en charge les coûts des services santé pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes et allaitantes. Ce mécanisme permettra aux services nationaux de suivre la situation nutritionnelle car les mères emmènent leurs enfants à l'hôpital, pas parce qu'ils sont malnutris mais parce qu'ils sont malades. Ce mécanisme contribuera à impliquer toutes les structures de l'Etat sans briser le système de recouvrement des coûts sans lequel le dispositif sanitaire national de se détruire.

Q : Quel est l'impact de l'aide alimentaire à l'intérieur du pays ? Est-ce que l'aide a permis la baisse des prix des céréales dans le pays ?

Il y a une légère baisse des prix du mil, mais celle-ci n'est pas généralisée. L'aide va sans doute avoir un impact sur le niveau des prix, mais il faudra être très vigilant au moment de la récolte. La distribution gratuite aura une date butoir de façon à ne pas perturber sur le prix des céréales sur les marchés.

Q : Est-ce que l'ONU a commencé à réfléchir sur les situations durables, notamment avec l'introduction des OGM ?

C'est une question pertinente avec une réponse difficile. Le Secrétaire General a évoqué la possibilité de convoquer une réunion de la CEDEAO pour débattre la problématique du développement à long terme de la région du Sahel. Concernant le Niger, il faut répondre aux besoins exprimés par les villageois eux-mêmes, c'est-à-dire l'eau. La bonne gestion des ressources hydrauliques devrait être la priorité, et dans le Sahel. Il faut envisager, entre autres, un investissement dans l'eau et la culture irriguée. En ce qui concerne les OGM, l'expérience a démontré que certaines graines de mil arrivent à maturité dans des délais plus courts. Si elles sont semées en juin, elles peuvent être récoltées au mois d'août, ce qui nous permettrait d'éviter la période difficile du mois de septembre. Mon avis personnel est de ne pas aborder dans le sens des OGM si l'on n'arrive pas à contrôler les modifications génétiques car cela pourrait être une nouvelle forme de dépendance.